Lorsque l’on évoque l’histoire du monachisme, on pense immédiatement au passé glorieux des Abbayes de France mais aussi aux Pères du Désert. Pourtant, l’histoire des monastères de France et d’ailleurs ne se résume pas à ces périodes fastes qui conduisirent les premiers ermites à se rassembler pour créer des communautés, qui donneront naissance aux abbayes.
Le monachisme en danger au cours du XVIIIème siècle
La Révolution française expulsa les religieux, et la vie monastique fut supprimée dès 1791. Le phénomène n’était pas uniquement français, et cette chasse aux religieux gangréna toute l’Europe et plus généralement tous les pays du monde. Nous reviendrons plus longuement sur ce drame pour le monachisme français.
Petit à petit, on chasse les moines de leurs abbayes, comme ce fut le cas en juin 1792 à l’abbaye de la Trappe. (n° 814) . Mais ces religieux s’organisèrent pour survivre mais aussi (pour certains) faire survivre leur ordre ou leur mouvement.On pourrait en rédiger des histoires de cette période trouble, mais celle des religieux de la Trappe nous renvoie à l’attitude des Cisterciens même si le terme peut apparaitre comme peu propice et judicieux.
Une épopée monastique pour surmonter les troubles
Les religieux de la Trappe rejoignent d’autres réfugiés à La Valsainte (Suisse), où une vie très austère se met en place. Des règlements rigoureux sont adoptés et les religieux doivent composer avec les décisions, parfois contradictoires, des autorités publiques. A la Valsainte, le dynamisme reprend et un vent de renouveau souffle, que ce soit avec la création d’un Tiers Ordre enseignant en 1794 pour l’instruction des enfants pauvres et orphelins, ou encore d’une branche féminie à Sembrancher dans le Valais Suisse.
Mais le vent tourne, et déjà les religieux de Valsainte doivent pour se protéger et survivre s’exiler à nouveau et c’est vers la Russie, que les différentes communautés (des divergences sont déjà apparues) se rendent. Ils n’y resteront pas longtemps, puisque le Tsar Paul Ier les expulse en mars 1800.
De la Russie à l’Amérique, l’Ordre cistercien en pleine tourmente
A partir de là, tout s’accélère puisque ces religieux de Valsainte essaiment partout à travers le monde. Les Etats-Unis, l’Angleterre, la France, l’Europe centrale, … Mais sur un plan politique, le XIXème siècle est aussi une grande période troublée. Cela aggrave aussi les dissonances déjà existantes entre la Commune Observance et les Trappistes. Et en cette période, il est difficile de réunir les opposants d’antan, d’autant que chacun reste droit dans ses principes.
Il serait long et fastidieux de dresser la liste de toutes ces oppositions, mais le XIXème siècle cristallisa cette opposition et la Commune Observance et les Trappistes représentaient les deux grandes voies suivies par l’Ordre Cistercien. Chacune de ces voies se réclamaient de la même origine, et pourtant elles semblaient déjà irréconciliables. La lettre apostolique « Non mediocri » du 30 juillet 1902 constatait cette transformation de l’unique Ordre cistercien en une « Famille cistercienne » composée de deux ordres.
L’ordre cistercien réformé ou de la stricte observance
Dans son chapitre général de 1893, l’Ordre des Cisterciens Réformés de Notre Dame de la Trappe élabora ses Us et coutumes. La restauration du monastère de Cîteaux marque une étape essentielle à la fin de ce XIXème siècle finissant. Désormais, la référence à la Trappe était devenue inutile, et la constitution « Haud mediocri sane » (30/07/1902) confirmait cette évidence en adoptant le nom d’Ordre des Cisterciens réformés ou de la Stricte Observance ».
Il y aurait encore beaucoup à écrire sur cette période mouvementée pour le monachisme en France, et nous nous y attèlerons très prochainement.
Vous voulez aller plus loin :
- Le XIXème siècle, la quasi-disparition de la vie monastique cistercienne. Mère Auguste Tescari. In Liens Cisterciens n° 36. 2019. Pp. 3-15
- Le site officiel de l’abbaye de la Trappe : https://www.latrappe.fr/
